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Pride and Prejudice : œuvre avant-gardiste ?

Dernière mise à jour : 1 sept. 2022


Par Caroline SALOMON.


Jane Austen est l'une des plus grandes auteures du XIXème siècle et est aujourd’hui notamment connue pour son chef-d’œuvre Pride and Prejudice. Derrière l’image de cette jeune femme brillante et en avance sur son temps, ses livres ont tendance à être décrits comme étant des « romans à l’eau de rose » et beaucoup l’ont accusée de ne pas vouloir réellement l’émancipation des femmes.


Or, Jane Austen semble revenir sur nos tables de chevet pour deux raisons : elle est soit très considérée des lecteurs car elle dénonçait l’oppression constante du "sexe fort", soit haïe de certains, accusée d’avoir desservi la cause féministe en renvoyant une vision résolument négative de la femme. Cette femme aux nouvelles méthodes et en contraste avec la gente masculine de son temps a-t-elle réellement desservi la cause des femmes ou a -t-elle participé à leur émancipation ?

Si l’on arrive à bien déchiffrer son écriture, son histoire personnelle et son esprit, notamment dans son œuvre Pride and Prejudice, il est indéniable que Jane Austen était bel et bien une femme en avance sur son temps qui proclamait la liberté des femmes.

Jane Austen est née en 1775 dans le Hampshire en Angleterre. Elle appartient à la petite catégorie de la noblesse anglaise non titrée, la « gentry », mais parvient cependant à se rendre à Oxford où elle se met très vite à briller. Sa famille, très attachée à la culture et à l’éducation, lui permet très jeune de pouvoir construire ses idéaux politiques et sociaux à travers de grands débats politiques.


En 1796, à l’âge de 21 ans, soutenue par son père, elle travaille à la publication de l’un de ses premiers romans : Pride and Prejudice. Elle se voit obligée d'écrire son roman en cachette et de le publier de la sorte car le monde de la littérature de l’époque était alors dominé par les hommes. Toutefois, sa persévérance lui permet de s’inscrire à contre-courant de la société. Son chef-d’œuvre connait plus tard, en 1813, un succès certain : c’est la première fois que le quotidien des femmes est décrit, sans passer par l’intermédiaire des hommes.

Ce roman de mœurs, considéré comme l’une des plus grandes œuvres de Jane Austen, présente les aventures des filles Bennet dans la campagne anglaise de la fin du XVIIIe siècle. Alors que Mrs Bennet tente de marier chacune de ses filles pour leur assurer un avenir financier stable, l’aînée, Jane, tombe amoureuse de Mr Bingley, homme très fortuné. Les rencontres de ces deux personnages permettent à la seconde des filles Bennet, Lizzie, de côtoyer Mr Darcy, décrit comme hautain et dédaigneux. De haute naissance, il est d’abord très méprisant, avant de dévoiler sa réelle personnalité et de tomber sous le charme de Lizzie. En effet, intelligente, drôle et dénonçant la société patriarcale dans laquelle elle vit, elle serait l’élément déclencheur de la soudaine métamorphose de Mr Darcy. Le roman dépeint également les comportements sociaux de la « gentry », ainsi que la conception de l’éducation, du mariage et de l’argent à l’époque de la Régence Anglaise.


Elizabeth Bennet se pose en véritable avant-gardiste. Elle ne se laisse pas diriger par les convenances de son époque et ce que la société attend d’elle en qualité de femme. Elle évolue en contraste avec les autres personnages féminins de l’œuvre, qui ne cherchent qu’à être « accomplies » et à satisfaire les attendus sociétaux dictés par le sexe opposé.




Jane Austen est la toute première écrivaine à ne se concentrer que sur la femme et son quotidien tel qu’elle le connait et le vit, rendant son œuvre pure et exacte. En effet, son héroïne, Elizabeth, est inspirée de son milieu social, la « gentry » anglaise ; les jeunes filles issues de ce milieu social étaient destinées à devenir des épouses discrètes, dévouées à une existence sédentaire et domestique. L’idéal féminin devait s’occuper de la maison.


Jane Austen utilise l’ironie dans toutes ses œuvres comme moyen d’expression en décrivant scrupuleusement le comportement, les remarques, la façon de parler des hommes qui se veulent supérieurs. Elle est contrainte de détourner ses pensées par l’emploi de ce registre qui lui permettait de ne pas être censurée : à l’époque, remettre en question la société et son organisation revenait à trahir les « intérêts vitaux d’un pays en guerre » et ne pouvait que soulever des problèmes sans réellement proposer de solutions.


Cependant, elle arrive à faire apparaitre plus distinctement les « handicaps » du sexe féminin de l’époque en se concentrant sur la sédentarité des femmes issues de son milieu social et en prenant une certaine distance qui lui permet de décrire très objectivement leur situation, tout en apportant avec exactitude les connaissances liées à son propre statut social. Ce qui importe pour elle, c’est de montrer la misère de la condition féminine en se concentrant sur les réalités des rapports hommes-femmes et la domination de ces premiers sur ces dernières.



Les lecteurs cherchent alors la perception d'un sentiment féminin d'oppression et d'impuissance consécutif à cette situation en lisant les romans de Jane Austen et ce chemin mène à la remise en cause du système patriarcal : on a affaire à des personnages masculins qui oppressent les femmes.

Les différentes techniques d’écriture de Jane Austen, en particulier le choix d'opter pour un point-de-vue féminin tout au long de l'œuvre, permettent aux lecteurs de voir à travers les aventures des jeunes héroïnes austéniennes une hostilité ferme et assurée de la société dans laquelle elles se trouvent enfermées. Elles voient alors en l’auteure une précurseuse du féminisme. Ce choix de narration témoigne l’opposition à une vision littéraire masculine de la réalité, avec un regard nouveau et subversif.

Il ne faut cependant pas croire que Jane Austen dénigre tous les hommes. Si la plupart du temps elle se moque de leurs comportements et de leur sentiment de supériorité, elle ne voit pas tous les hommes comme des tyrans, loin de là ; elle ne s’est jamais livrée à une véritable guerre des sexes.


Si l’on reprend l’exemple de Pride and Prejudice, le père d’Elizabeth, M. Bennet, montre une véritable adoration pour sa fille avec laquelle il tisse un lien très spécial. Leur complicité, leur intelligence, leur culture et leur soif d’apprendre les posent sur un pied d’égalité. Elle va plutôt s’acharner sur l’archétype du jeune homme désireux de plaire et égoïste.


Le regard des personnages de Jane Austen est donc porté sur les réalités qui les entourent, il est féminin mais n’est en aucun cas partial ou partisan. Et si dans un premier temps Elizabeth refuse la proposition de Mr Darcy car ce dernier se présente d'abord comme l’archétype masculin que dénigre Austen dans ses œuvres, elle finit par l'accepter dès lors qu'il apparait respectueux, bon et aimé de l’héroïne.

Accepter le regard féminin dans les œuvres de Jane Austen nous permet donc non seulement de noter un caractère, original pour l'époque, mais également de souligner la mission féministe qu’il est important de lier à ses œuvres. Jane Austen a su qu'il fallait utiliser l'expérience vécue et faire triompher la vérité car tout ce qui était hors de son domaine ne pouvait que nuire à sa création littéraire.


Ainsi, Jane Austen, de par son innovation, son courage et les idéaux qu’elle défend ardemment, semble être une « féministe » avant l’heure. Elle a permis un véritable tournant dans la littérature anglaise mais également à l'échelle mondiale en plaçant toujours la femme et ses pensées au cœur de ses œuvres.







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